MARC  LABOURET

Médailles de Jacques France

Jacques France est connu comme sculpteur d'une célèbre "Marianne". Mais il a aussi édité plusieurs médailles sur ce même thème républicain. Il en a frappé plusieurs avec le métal récupéré dans le Palais des Tuileries incendié en 1871.

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République maçonnique. Médaillon de Jacques France (ci-dessous n° 1).

Les Tuileries

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        Le palais des Tuileries, à Paris, apparaît à la Renaissance et disparaît en 1871. A plusieurs reprises, il a servi de résidence privilégiée des souverains. Les plus célèbres architectes français y ont œuvré : Philibert Delorme, Androuet du Cerceau, le Vau, Percier… Au moment de sa destruction, les bâtiments additionnaient des parties Renaissance et classique, tandis que les aménagements intérieurs dataient du Premier Empire et de Louis-Philippe.
       Symbole du pouvoir personnel, il est incendié par des communards le 23 mai 1871, pendant que commence la terrible répression de la révolte parisienne. Il brûle pendant trois jours. Ensuite, pendant plus de dix ans, sa carcasse vide interpelle les pouvoirs publics : faut-il restaurer ou détruire ces ruines ?  Le débat est très large ; de nombreuses propositions sont élaborées, mais en définitive la décision de le raser est prise en 1879, et sera appliquée en 1883.
       De nombreux éléments sont récupérés : éléments architecturaux, qu’on peut voir encore dans des jardins parisiens, mais aussi à Marly, Suresnes, Saint-Raphaël, Ajaccio, et même jusqu’à Berlin et Quito (Equateur). Le Figaro détaille en presse-papiers publicitaires des morceaux de marbre. Enfin, le fondeur et sculpteur Jacques France acquiert le bronze fondu par l’incendie.

Jacques France

       Jacques France est le pseudonyme de Paul Lecreux, sculpteur et fondeur né à Lille en 1836 et mort à Paris en 1894. Il était franc-maçon, membre de la célèbre loge l’Etoile polaire, illustrée par plusieurs jetons et médailles (qui ne semblent pas lui être dues).
       Il est surtout célèbre pour son buste de Marianne, réalisé en 1882. A la demande de la loge la Bonne Foi, à Saint-Germain-en-Laye, il réalise le buste d’une Marianne parée d’un cordon maçonnique. Le buste est une telle réussite qu’il séduit non seulement les francs-maçons, mais aussi le comité qui, sous la présidence de Victor Hugo, est chargé de retenir des emblèmes pour la jeune République encore fragile. En supprimant les symboles maçonniques du ruban, elle devient un des ornements de choix pour les mairies de France. Il en subsiste encore çà et là, malgré la concurrence de stars plus récentes.
       Notons qu’à l’époque de sa réalisation, le bonnet « phrygien » est encore un symbole révolutionnaire, contrairement aux représentations plus sages coiffées d’une couronne de laurier ou d’un rayonnement solaire – comme la statue de la Liberté ou la République des pannonceaux de notaires.

 

Les médailles

      Mais le fonds de commerce de Jacques France ne se réduit pas à ce buste. Il réalise aussi des médailles représentant, d’abord la République maçonnique, puis la République des communes. Comme fit en 1789 le Citoyen Palloy avec les vestiges de la Bastille, Jacques France commercialise les souvenirs des Tuileries, nouveau symbole de la chute de l’absolutisme.
           Nous présentons ici huit de ces médailles. Peut-être en existe-t-il d’autres, que nous n’avons pas encore rencontrées.
       Le premier grand médaillon est explicitement maçonnique, confondant en une même allégorie la République et la Franc-maçonnerie. D’autres le deviennent par destination : la n° 3, appropriée par une loge particulière, la n° 6 selon son dédicataire, la n° 8 grâce au ruban. La médaille n° 7 présente quant à elle un bel ensemble de symboles maçonniques autour d'un triangle.

Attention ! Les reproductions ne sont pas à l'échelle !

1. REPUBLIQUE MAÇONNIQUE (illustration en tête d'article).

Uniface. Bronze. 172 mm.
REP MAÇ / DE (en écriture gothique) : jacques france ; Marianne à droite dont le bonnet phrygien s’orne d’une équerre et d’un compas entrecroisés, le pivot du compas constituant aussi le centre de la cocarde tricolore.

2. REPUBLIQUE DES COMMUNES.
 
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30 mm. Métal inconnu.
A : REPUBLIQUE DES COMMUNES ; tête de Marianne à gauche portant un cordon maçonnique marqué de la date 1870 et d’une équerre et d’un compas entrecroisés ; signé JACQUES FRANCE.
R : SOUVENIR / DE LA FETE DU / 14 JUILLET / - / 1882.
 

3. REPUBLIQUE DES COMMUNES, TLEMCEN

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Il s’agit du même avers qu’à la médaille précédente, avec un revers adapté à une loge particulière. Il en existe pour différentes loges.

4. METAL DES TUILERIES.

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72 mm. Bronze. Bélière en forme de feuilles de laurier.
A : METAL DES TUILERIES / jacques france INV 1883 ; Marianne en bonnet phrygien à droite ; signature à gauche P. TASSET.
R : texte en sept lignes : METAL / TROUVE DANS LES RUINES / DU / PALAIS DES TUILERIES / FONDE EN L’AN 1564 / ET DETRUIT PAR L’INCENDIE / LE 24 MAI 1871 / cartouche portant un numéro ; signatures cursives A. Picard, Lapeyre.

5. METAL DES TUILERIES.

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34 mm. Bronze. Monté en broche.
A (identique au précédent) : METAL DES TUILERIES / jacques france INV 1883 ; Marianne en bonnet phrygien à droite ; signature à gauche P. TASSET.
R : identique au précédent.

6. METAL DES TUILERIES.

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34 mm. Bronze.
A (identique au précédent) : METAL DES TUILERIES / jacques france INV 1883 ; Marianne en bonnet phrygien à droite ; signature à gauche P. TASSET.
R : texte en dix lignes, en écriture pseudo-gothique : Sur ce fragment de / métal provenant du /Palais de la Reine Catherine / lequel Philibert Delorme bâtit / en 1564 aux lieux dits Tuileries / le sculpteur Jacques France / a fait frapper cette figure pour / l'offrir en témoignage de / fraternité à Monsieur / (réserve) / 1883.

7. METAL DES TUILERIES.
 
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A : METAL DU PALAIS DES TUILERIES – FONDE EN 1564 – INCENDIE EN 1871 – DEMOLI EN 1883 ; champ : façade du pavillon central du palais ; sur le pavé du premier plan, trois signatures.
R : Chaîne fermée sur le pourtour ; triangle plein champ ; entre les côtés du triangle et la chaîne, outils maçonniques et feuillages.
 
8. L’AVENIR.
 
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27 mm. Métal blanc. Uniface.
La République en bonnet phrygien, à droite. Signé Jacques France.
Le ruban donne la datation et l’attribution à la loge :  L’AVENIR / 1789 / CENTENAIRE / DE LA / REPUBLIQUE / 1889.
 
  La loge L'Avenir résulte du changement de nom, en 1863, de la loge Saint-Antoine du Parfait Contentement, qui nous a légué des jetons de présence qu'on peut classer parmi les plus beaux. Sous ce nouveau titre distinctif, la loge est, au début de la Troisième République, une des plus progressistes. C'est elle qui, la première, adopte pour acclamation les mots Liberté ! Egalité ! Fraternité ! Parmi ses membres les plus fameux, outre Eugène Pelletan, on note les deux gendres de Karl Marx, Charles Longuet et Paul Lafargue.